Une révoltée au secours des démunis

En ce mois de février, qui marque l’anniversaire de la naissance d’une grande dame, le blog souhaite rendre hommage à cette personnalité qui a choisi de se mettre au service des autres.        

Son œuvre, la Résidence sociale, lui a survécu mais son souvenir un peu moins. Il s’agit de Marie-Jeanne Bassot.

Une enfance aisée

Marie-Jeanne Bassot nait à Paris le 22 février 1878. Elle est le troisième enfant d’une famille bourgeoise qui en comptera quatre. Son père, Léon Bassot, polytechnicien et militaire devient le directeur du service géographique de l’armée en 1900. Sa mère vient de la bourgeoisie parisienne.

Ses parents décident de ne pas l’envoyer à l’école et d’assurer son instruction à domicile. Marie-Jeanne Bassot reçoit une éducation conforme aux coutumes de l’époque, rigoureuse, avec des principes stricts.

Si elle a des loisirs de jeune fille aisée (elle joue du piano et aime la littérature), Marie-Jeanne Bassot ne peut cependant rester insensible aux conditions de vie difficiles du monde ouvrier. À travers ses visites aux plus démunis, et suite aux conseils de son aumônier, elle se découvre une vocation religieuse. Rapidement ses parents mettent fin à ses espoirs d’une vie dévouée à cette vocation.

Néanmoins en 1903, cette fille de bonne famille se joint au projet de l’ancienne religieuse Mercedes Le Fer de la Motte qui s’emploie à ouvrir des Maisons sociales depuis 1898. Ces maisons, ancêtres des maternelles, étaient implantées dans les quartiers ouvriers et, outre l’organisation d’activités, avaient vocation à lutter contre la tuberculose et l’alcoolisme.

La rupture

Marie-Jeanne Bassot veut s’engager dans ce mouvement social, mais ses parents, pour contrecarrer ses projets, vont jusqu’à l’enlever et la faire interner dans une clinique en Suisse en la faisant passer pour folle.

Elle réussit à s’échapper et Marie-Jeanne Bassot intente un procès à ses parents pour séquestration arbitraire. Le procès a lieu entre mars et avril 1909, et fait la « une » de la presse parisienne.  Le jugement est en faveur de Marie-Jeanne Bassot, mais l’œuvre des maisons sociales pâtit dès lors d’une mauvaise réputation et les financements se font plus rares.

En 1909, Mercedes Le Fer de la Motte, pour laquelle Marie-Jeanne Bassot a rompu avec toute sa famille, décide de fermer ses Maisons sociales.

Meurtrie mais résolue, Marie-Jeanne Bassot reprend alors le flambeau avec détermination.

L’année suivante, elle loue, avec son amie Mathilde Girault, un deux-pièces dans le quartier des passages à Levallois, le long des fortifications de Paris, ce que les Levalloisiens appellent alors la zone

Passage Valmy
  Levallois- La porte de Villiers et les fortifications

Les deux femmes gagnent leur vie en donnant des cours de langue et de piano le matin et consacrent le reste de leur journée à l’aide sociale.

Pendant la Première Guerre mondiale, Marie-Jeanne Bassot vient également en aide aux Levalloisiens plongés dans les difficultés de la guerre. Elle crée un « ouvroir de guerre » afin d’offrir une rémunération aux femmes qui confectionnent des sous-vêtements pour l’Intendance militaire. Elle met également en place un comité d’aide aux orphelins de guerre et aux anciens combattants.

Tout ceci est une occasion pour Marie-Jeanne Bassot de découvrir les institutions philanthropiques américaines comme la Mission Rockefeller et l’American Red Cross qui œuvrent dans une France dévastée par la guerre.

Après-guerre, Marie-Jeanne Bassot est invitée aux États-Unis pour présenter son action levalloisienne mais aussi pour découvrir les expériences menées là-bas. Elle revient convaincue qu’il est possible d’agir.

Son œuvre

Usine de la parfumerie Oriza-Legrand

En 1920, Marie-Jeanne Bassot dépose les statuts de son association à la préfecture de police, acquiert l’ancienne propriété d’Antonin Raynaud (les parfumeries Oriza), qui comprend plusieurs bâtiments et un hôtel particulier, seul bâtiment rescapé aujourd’hui.  Cette acquisition a pu se faire avec l’intervention financière de l’association américaine « American women hospital ».

Diverses activités sont proposées dans la nouvelle Résidence sociale : éducation physique, éducation intellectuelle, artistique et sociale. Un dispensaire y est également installé. Des kermesses et soirées sont organisées afin de récolter des dons.

En 1922, la Résidence Sociale est reconnue d’Utilité publique.

La même année, Marie-Jeanne Bassot crée la Fédération des Centres sociaux de France et six ans plus tard, une Résidence Sociale sociale est ouverte à Saint-Denis, puis une autre à Saint-Ouen, en 1930 et enfin un aérium en 1932, date à laquelle Marie-Jeanne Bassot est décorée de la Légion d’honneur.

Une vie de combats

Après une vie de luttes et de convictions, Marie-Jeanne Bassot s’éteint à l’âge de cinquante-sept ans des suites d’un cancer, en décembre 1935 au sein de la Résidence sociale.

Réunion en présence de Marie Jeanne Bassot

Elle est inhumée au cimetière municipal de Levallois. Sur sa tombe, l’épitaphe suivante est inscrite « Je désire être enterrée au milieu des familles auxquelles j’ai consacré tout mon apostolat. »

La Résidence sociale Marie-Jeanne Bassot de Levallois honore aujourd’hui encore sa mémoire en poursuivant son œuvre. Une rue de Levallois porte également son nom depuis 1945.

La Résidence sociale aujourd’hui