Lors de promenades dans des lieux que nous ne connaissons pas, ou mal, nous baptisons les lieux avec ce que nous observons : nous allons parler du chemin avec un arbre sec, du village avec une drôle de grange au toit rouge, de la ruelle où nous avons croisé un chat peu farouche… Il en allait de même à la naissance des villes et villages. Bien souvent les rues étaient baptisées du nom de l’un des propriétaires importants, ou du premier acquéreur dans la voie. Levallois ne fait pas exception à la règle ! Beaucoup de rues portent, ou ont portées les noms de propriétaires et aussi amis de Monsieur Nicolas-LEVALLOIS.
Rue FAZILLAU
Ami de Nicolas-LEVALLOIS et menuisier tout comme lui, monsieur FAZILLAU est l’un des premiers acquéreurs d’une parcelle à « la vigne aux prêtres ». D’une longueur d’un peu moins de 1 500 mètres, cette voie a été ouverte en quatre étapes entre 1843 et 1878. Jusqu’en 1888, cette rue n’est que partiellement viabilisée, au gré des demandes et des moyens des riverains. La chaussée est dans un tel état que la circulation des voitures (attelages, charrettes à bras…) y est très pénible.
Dès 1860, c’est la parfumerie Roger & Gallet qui prend place au sein de cette rue, à proximité de Paris.
Plus tard à l’autre extrémité, la chocolaterie Meunier s’y installe. Elle occupe un grand terrain puisqu’elle se situe aux angles des rues FAZILLAU, BAUDIN, et des frères HERBERT.
Pour le plus grand mécontentement des riverains, une manufacture de cigares (les cigares Gardot) s’établit au numéro 105. La municipalité doit faire face à de nombreuses plaintes, car les habitants voisins de cette manufacture sont dérangés par l’odeur et la fumée qu’elle dégage.
Très dynamique et marchande, au début du siècle cette rue accueille une brûlerie de café, un marchand de fourrage et des ferrailleurs. Petite anecdote, en 1899, cette rue est à la pointe des nouvelles technologies, car aux numéros 128 et 139, se trouvent deux des cinq premiers abonnés au téléphone de Levallois.
La rue FAZILLAU change de nom en 1925, et s’appelle désormais rue Jules GUESDE.
Vous noterez que le tabac à droite sur les photos, s’il a changé de nom, existe toujours !
Rue de GRAVEL
Encore un ami de Nicolas-LEVALLOIS ! Joseph-GRAVEL est menuisier et échafaudeur… Cette rue est crée en même temps que le village Levallois, et le traverse entièrement sur une longueur d’un peu plus de 1500 mètres. Entre les rues de Villiers et CORMEILLE(Anatole-FRANCE), ce tronçon de la rue s’appelle rue de DRESDE. La voie s’appelle GRAVEL sur toute sa longueur en 1878.
Elle démarre de la rue de Villiers, longe l’Hôtel de ville, un hôtel des postes, et l’école Jules-FERRY et le restaurant coopératif « l’étoile bleue » pour s’arrêter devant la gare. Cette rue sera même empruntée par une ligne de tramway (à traction animale).
Depuis 1932, cette rue porte le nom d’un récipiendaire du prix Nobel de la paix de 1926, ancien Président du Conseil et ministre des Affaires étrangères : Aristide BRIAND.
Rue SIBOUR
Lorsque Nicolas-LEVALLOIS entreprend le lotissement des terrains de Léon NOEL, un chemin déjà indiqué sur la Carte des Chasses au XVIIIe siècle lui sert de repère pour le percement de cette voie, de la route d’Asnières au chemin de Villiers. Il lui donne le nom du pharmacien PELLETIER (l’inventeur de la Quinine) qui a installé son usine dans les bâtiments de l’ancien château de la Planchette.
On décide de la rebaptiser « rue Sibour » en souvenir de Mgr SIBOUR archevêque de Paris, et ami de Nicolas-LEVALLOIS, qui en 1852 bénit l’église du village. Cinq ans plus tard, il est assassiné par un prêtre réfractaire.
La rue SIBOUR traverse l’ensemble de la commune, parallèlement à la seine.
En 1878, cette rue est à nouveau rebaptisée, du nom de Baudin. Nous ignorons s’il s’agit d’un hommage à Alphonse BAUDIN. médecin et homme politique, tué sur une barricade alors qu’il s’opposait au coup d’État du 2 décembre 1851 de Louis-Napoléon BONAPARTE ou d’un homonyme propriétaire d’une parcelle attenante à la voie.
Rue FELIX
Jusqu’en 1883 cette rue portait le nom de rue FELIX, encore un menuisier et ami de Nicolas-LEVALLOIS qui participa aussi à la construction du « Village Levallois » en 1845. Il est un des premiers propriétaires du village. La rue Félix fut percée dès 1851 de la rue du Bois (rue Jean-JAURES) à la lisière du domaine de la Planchette. Elle atteint sa longueur actuelle en trois fois. Dès 1858, le premier tronçon de la rue profite de la création du marché.
La rue FELIX change de nom en 1883, et devient la rue CARNOT, en hommage à cette famille. Lazare CARNOT est un mathématicien et homme politique, père de Sadi et Hippolyte (respectivement physicien et homme politique). Hippolyte-CARNOT est le père de Marie François Sadi CARNOT qui deviendra Président de la République en 1887.
En 1916 cette rue est ouverte à la circulation. En 1931, la commune oblige les propriétaires riverains de la partie comprise entre les rues Jacques-MAZAUD et VOLTAIRE à se constituer en syndicat pour la réfection de la rue dont les trottoirs sont encore en terre. L’année suivante ce tronçon est classé dans le domaine public.
Rue POCCARD
Certains d’entre nous avons connu cette rue avec cette appellation. Ma grand-mère n’a jamais su s’y faire et s’est entêté a la nommer POCCARD alors que cette rue a pourtant changé de nom en 1946 !
Cette rue ne porte pas le nom d’un ami de Nicolas-LEVALLOIS, mais d’un entrepreneur. C’est lui qui construit les premières maisons à usage d’habitation dans le village Levallois. Cette voie atteint sa longueur actuelle en plusieurs fois. En 1914, la vie économique et commerçante de la rue reste modeste, en effet, outre le marché, on y dénombre juste un logeur de chevaux, un sellier, trois entreprises de fiacres et un fabricant de couronnes funéraires. Il ne faut pas négliger le fait que cette rue longe l’Hôtel de ville sur sa face arrière.
Comme je vous le disais, la rue POCCARD perd son nom en 1946 au bénéfice de celui de Gabriel PERI. Journaliste et homme politique, il est arrêté en mai 1941 comme résistant par la police française, et fusillé au Mont Valérien par les allemands le 15 décembre de la même année.
À suivre…