Auriez-vous l’heure ?

En vous couchant samedi 26 mars, n’oubliez pas d’avancer votre montre et votre réveil d’une heure ! En effet, dans la nuit du 26 au 27 mars, à 2 heures du matin, il sera 3 heures ! dans les faits, le passage à l’heure d’été fait perdre une heure de sommeil et décale de deux heures l’heure légale par rapport au soleil. Chaque année, le changement a lieu le dernier dimanche de mars. Mais d’où vient cette idée ?

Je me propose de vous l’expliquer, et j’en profiterai pour vous raconter l’histoire de l’entreprise Brillié, née à Levallois, qui a donné l’heure à de nombreux Levalloisiens, et a marqué l’histoire de l’horlogerie.

Petite histoire du changement d’heure

En 1784, dans le quotidien français le journal de Paris, Benjamin Franklin évoque pour la première fois la possibilité de décaler les horaires afin d’économiser de l’énergie. Cette idée n’est pourtant pas très populaire à une époque où la société est encore très largement agricole, et où l’heure « utile » est celle du soleil, qui varie de 50 minutes de l’Est à l’Ouest de la France.

L’heure est unifiée

Un siècle plus tard, avec le développement des transports ferroviaires, il devient nécessaire d’unifier l’heure sur l’ensemble du territoire français. La décision est prise en 1891 ! L’heure de Paris devient l’heure nationale. Le même processus se produit dans différents pays du monde. Les différences d’heures entre les pays correspondent aux différences de longitude de leur méridien de référence. Ce n’est qu’en 1911 que la France accepte d’adopter le méridien de Greenwich et de reculer ses horloges de 9 minutes et 21 secondes, passant ainsi à l’heure anglaise.

Les tribulations des heures d’été et d’hiver

En ce qui concerne le changement d’heure (été/hiver), l’idée reste un temps sans suite, et n’est reprise qu’à partir de 1907 par le Britannique William Willet qui démarre une campagne contre « le gaspillage de la lumière ».

L’Allemagne est la première à instaurer ce changement d’heure le 30 avril 1916. Elle est rapidement suivie par le Royaume-Uni le 21 mai 1916.

En pleine Première Guerre mondiale, la France aussi souhaite économiser ses ressources énergétiques (charbon et pétrole) et l’heure d’été est proposée par le député André Honnorat en 1916, et est instituée par une loi votée le 19 mars 1917 (par 291 voix contre 177).

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les troupes nazies envahissent le pays en juin 1940, et instaurent « l’heure allemande » qui est basée sur Berlin. A la libération, l’heure d’été est abandonnée par le Gouvernement provisoire le 14 aout 1945, mais il décide de conserver l’heure allemande d’hiver. Les Français vivent donc à la même heure que l’Allemagne en hiver mais non en été, le décalage d’une heure est donc maintenu. Il était prévu de revenir au système initial, mais cette idée a été abandonnée.

Ce n’est qu’en 1976, et toujours dans un souci de faire des économies (réduire les besoins d’éclairage en soirée), dans une période de crise, suite au « choc pétrolier » de 1973, que le gouvernement de Valéry Giscard d’Estaing rétablit l’heure d’été. La France retrouve une alternance d’heure bisannuelle. La mesure doit d’abord être provisoire et ne durer que le temps du « choc pétrolier » …  Elle est très décriée par les Français, cette alternance ayant un impact sur le sommeil, l’alimentation et l’humeur comme le décrivent plusieurs études.

Le passage à l’heure d’été a lieu le dernier dimanche de mars à 2 h du matin. Jusqu’en 1995, le passage de retour à l’heure d’hiver a lieu le dernier dimanche de septembre à 3 h. Mais depuis 1996, il s’effectue le dernier dimanche d’octobre (à la même heure), ce qui prolonge la période d’heure d’été durant une partie de l’automne.

Cette modification horaire relève de la responsabilité de l’Observatoire de Paris qui a en charge d’établir, de maintenir et de diffuser le temps légal français.

Brillié, une entreprise d’horlogerie levalloisienne

Le premier nom porté par la société (SNC Charles Vigreux et Lucien Brillié ) est celui des deux ingénieurs constructeurs à l’origine de sa fondation à Levallois en 1898. Son activité concerne alors « les appareils mécaniques et électriques ».

Cette entreprise est en effet à l’origine de l’application de l’électricité à l’horlogerie monumentale, en permettant la suppression du remontage manuel des poids par des cordages.

Les ateliers de la société Brillié à Levallois
Pendule de gare double face

Elle est célèbre pour avoir construit la première horloge parlante optique à l’Observatoire de Paris en 1933, inventée par Ernest Esclangon, directeur de l’Observatoire. Elle a également fabriqué la première horloge parlante magnétique, dont plusieurs centaines d’exemplaires ont ensuite équipé les bases militaires françaises et de nombreux centraux téléphoniques du monde. L’entreprise peut s’enorgueillir d’avoir équipé en horloges beaucoup de gares (elle a été le fournisseur officiel de la SNCF très longtemps), de ports, d’écoles, d’églises et autres lieux publics en France et à l’étranger.

Au fil du temps, la société Brillié acquiert une renommée internationale. Elle se distingue sous le nom de SNC Brillié Frères dès 1900 à l’Exposition universelle de Paris lors de laquelle elle reçoit une médaille d’or. D’autres médailles et distinctions suivront à l’occasion de diverses expositions et salons.

Dans les années 1950, la Ville de Levallois passe un marché avec les établissements Brillié pour l’installation d’horloges électriques, notamment dans certaines écoles de la commune. Au détour des rues, la marque apparait au centre des cadrans des horloges anciennes.

La période 1958-72 est celle de l’expansion maximale de la société, elle compte 280 salariés. L’entreprise règne sur 80% du marché français de l’horlogerie industrielle aux alentours des années 60.

Les premières difficultés apparaissent à partir de 1973, elles sont en partie liées à l’apparition de l’électronique dans l’horlogerie. Brillié, marginalisée par son image traditionnelle de spécialiste de l’électromécanique horlogère, semble s’être endormie sur ses lauriers, et n’a pas su prendre le virage de l’électronique et de la diversification.

A partir de 1981, la Société Anonyme des Ateliers Brillié Frères éclate en deux sociétés distinctes : la SA Brillié Systèmes à Levallois et la SCOP Brillié à Montbrison.

Alors que l’usine de Levallois, rue de Villiers, disparait à la fin des années 1980 à l’occasion de la rénovation de la ZAC du Front de Paris, l’activité horlogère du site de Montbrison cesse en octobre 1996.

Lutte pour le droit des femmes

Depuis la décision des Nations Unies en 1977, le 08 mars est la journée internationale du droit des femmes. Je me saisie de cette journée et profite de l’occasion pour retracer les principaux grands combats des femmes en France pour obtenir l’égalité.

La Révolution française, une occasion manquée…

Dès la fin du XVIII ème siècle, les femmes revendiquent une égalité des droits. Au moment de la Révolution, en 1791 précisément, Olympe de Gouges (considérée comme une des pionnières du féminisme en France) réclame l’égalité entre hommes et femmes dans sa « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne », qui stipule dans son article premier :  » La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits » et dans son article 10 :  » La femme a le droit de monter sur l’échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune ».

Elle revendique également pour les femmes la liberté d’opinion et la liberté sexuelle. A ce titre, elle réclame la suppression du mariage, et l’instauration du divorce.

 Malheureusement, son combat prend fin lorsqu’elle est guillotinée, sur ordre de Robespierre, le 3 novembre 1793.

Pire encore, le code civil napoléonien rend la femme mariée « mineur » et consacre son incapacité juridique face à l’homme : au nom de la famille et de sa stabilité, les femmes sont soumises à l’autorité du mari.

Il faudra attendre le préambule de la Constitution de 1946 pour voir poser le principe de l’égalité Hommes /Femmes dans tous les domaines.

La lutte pour le droit des femmes va prendre plusieurs aspects qui ont marqué l’histoire de notre ville.

Le droit à l’éducation

Lors de la création du village Levallois en 1845, il existait une seule école. En 1850, la loi Falloux et le développement démographique conduisent à la création de plusieurs écoles, ouvertes également à l’éducation des jeunes filles.

Ainsi sous la IIIe République, les lois de Jules Ferry instaurent l’enseignement primaire obligatoire, gratuit et laïque ouvert aux filles comme aux garçons. Les communes construisent des groupes scolaires avec une entrée distincte pour les filles et pour les garçons. Les écoles Jules Ferry et Anatole France, inaugurées en 1885, en portent encore la trace dans l’architecture des bâtiments. En 1903, il existe quatre écoles de garçons et quatre écoles dites de filles avec 1 817 petites élèves.

Quelques disparités existent.  À titre d’exemple, l’école de garçons de la rue Rivay dispose d’une bibliothèque regroupant 615 livres, alors que la bibliothèque de l’école de filles ne contient que 160 livres…

Il faut attendre 1924 et le décret Bérard pour que les programmes scolaires filles et garçons deviennent identiques, et que les épreuves du Baccalauréat soient les mêmes.

Puis avec l’après-guerre, la mixité est mise en place de façon progressive.

Finalement, les décrets d’application de la loi Haby du 28 décembre 1976 rendent la mixité obligatoire dans l’enseignement primaire et secondaire.

En dehors du cadre scolaire, des institutions comme la Résidence sociale de Levallois œuvre pour l’éducation tant physique qu’intellectuelle des jeunes filles.

Le droit de vote et d’éligibilité

Le droit de vote des femmes a connu des avancées, mais aussi de sacrées « reculades ». En effet, si les femmes revendiquent le droit de vote tout au long au XIXe siècle, à l’exemple de la Levalloisienne Louise Michel qui ne manque pas d’évoquer ce combat lors de ses conférences, ce droit, les femmes l’ont pourtant eu et exercé. Elles ont pu voter au cours du Moyen-Age, pour certaines élections de conseils communaux, ou à l’occasion d’états généraux, jusqu’en 1498 où un décret parlementaire classe les femmes parmi les citoyens « passifs », ne pouvant s’acquitter du cens électoral.

Le grand tournant pour le droit de vote des femmes en France est la Première Guerre mondiale. Si la France est victorieuse, elle le doit en partie à la mobilisation et à l’effort de guerre réalisés par les Françaises dans les campagnes et les usines, comme à Levallois dans les ateliers de munitions de Clément-Bayard ou encore pour les hôpitaux militaires levalloisiens.

Certains pays sont conscients de cette nécessité d’accorder le droit de vote aux femmes : Allemagne, États-Unis, Pays-Bas, Belgique, Luxembourg, Suède, l’Inde, Turquie, Nouvelle-Zélande (les néo-Zélandaises vote depuis 1893), Australie (les femmes y ont le droit de vote depuis 1902)…

Mais là encore, le débat s’éternise en France.  

Il faut attendre la Seconde Guerre mondiale et le programme national de la Résistance pour poser ce droit comme irrémédiable.

Le Général de Gaulle déclare, en mars 1944 devant l’Assemblée consultative provisoire que « le régime nouveau doit comporter une représentation élue par tous les hommes et toutes les femmes de chez nous ».

L’ordonnance du 21 avril 1944 portant organisation des pouvoirs publics en France après la Libération, dispose en son article 17 que « les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes ».  A partir de cette date, les Levalloisiennes figurent sur les listes électorales, document symbolique du droit de vote. Elles exercent ce droit pour la première fois dans le cadre des élections des conseils municipaux des 29 avril et 13 mai 1945. Ernest Perney sera élu Maire.

Avis important aux électrices 1945

A la faveur de la loi de 2007 qui impose la parité dans l’élection des adjoints, la proportion des femmes élues maires est de seulement 19,8 % après les élections de 2020.  

Ce n’est seulement qu’en 2020 que le Maire de Levallois est une femme.

En 2012, avec 155 femmes sur 577 députés, l’Assemblée nationale française compte 26,9% de femmes.

Les élues ont majoritairement en charge des activités en lien avec l’éducation et le social. Le phénomène des « cloisons de verre » concerne aussi les femmes en politique.

Le droit de disposer d’elle-même

Une loi de 1938 réforme l’article 213 du Code civil de 1804 et supprime l’incapacité juridique des femmes. Les Françaises ne doivent plus obéissance à leur époux mais les époux se doivent mutuellement fidélité, secours et assistance.

Cette locution est rappelée lors des cérémonies de mariages à l’Hôtel de ville.

Autre révolution en juillet 1965 : les Françaises acquièrent le droit de travailler sans l’autorisation de leur mari et d’ouvrir un compte bancaire ou postal en leur nom propre.

Après la Seconde Guerre mondiale, les femmes revendiquent la possibilité de disposer librement de leur corps. Ainsi, Simone Veil, ministre de la Santé, présente le projet de loi sur l’interruption volontaire de grossesse dépénalisant l’avortement.  Cette loi de 1975 reste un marqueur fort de la présidence de Valéry Giscard d’Estaing.

L’égalité femmes/hommes est encore aujourd’hui un enjeu de société…